🍿CINÉMA I NINJA BABY DE YNGVILD SVE FLIKKE
(l'art subtil (ou presque) du discours décomplexé !)
PAR STEFANY DUROCHER - 24.10.2022
Synopsis : Rakel ne se doutait de rien, mais découvre qu'elle est enceinte de déjà six mois. Elle n'a pas le temps de reprendre ses esprits que déboule Ninjababy, incarnation crayonnée et bruyante de son futur enfant, tout droit sorti de son imagination. (Synopsis officiel fourni par le Festival International du Film de La Roche-sur-Yon)
Ce n’est pas le choix d'œuvres cinématographiques alléchantes qui manquent en salles à la Katorza en ce moment. Parmi ces choix, de nombreux films déjà récompensés ou louangés par la critique y sont à l’affiche tels que Sans filtre, Revoir Paris, Chronique d’une liaison passagère, Juste sous vos yeux, Nayola, Les enfants des autres pour ne nommer qu’eux. Une sélection qui donne envie aux amateurs du 7ème art de passer ces premiers jours d’automne pluvieux au cinoche.
C’est pourtant sur le titre Ninja Baby (titre amusant et original qui a capté l’attention de mon adolescence intérieure), que j’ai jeté mon dévolu ce week-end. N’ayant pu me soustraire à l’irrésistible envie de regarder la bande-annonce, cette production norvégienne de la réalisatrice Yngvild Sve Flikke qui m'a semblé comme une promesse de ne pas se prendre trop au sérieux malgré que le thème principal abordé…
Et c’est exactement cela, dès les premières scènes, le charme brut de Rakel, le personnage principal, incarné par la très talentueuseKristine Kujath Thorp, opère et impose une ambiance désarmante de vérité, de sincérité et surtout, d’authenticité.
Authenticité qui fait, à mon avis, la force de ce récit qui n’est pas sans petites failles ou petites faiblesses scénaristiques, mais qui est facilement pardonné par une véritable volonté de raconter sans superficialité.
COMME UN ''SAFE PLACE''
Si le récit gravite principalement autour de Rakel et la surprise d’une grossesse non désirée, les sous-thèmes explorés autour de la conception d’un petit humain, sont ici nombreux et également abordés à travers le prisme des autres personnages.
À l’apparence légère et loufoque, cette comédie dramatique ne manque pourtant pas de substance tant qu’aux thèmes abordés ; celui du rapport des femmes à la maternité, du désir féminin, de la contraception, de l’avortement, des droits parentaux, de l’abandon et de l’adoption, de la pression sociale qui prend souvent des aires de bienveillance de la part de l’entourage immédiat et of course, de l’amour au temps de l’adulescence (et bien d’autres sous-thèmes effleurés).
Bien que la dimension féministe a été souligné à de multiples reprises dans les médias, Ninja baby a pour mission de participer à la déconstruction de l’image de la femme maternelle et maternante, de l’idée que toutes les femmes désirent, voire rêvent d’enfanter et par dessus tout, contribue à repartager de façon équitable entre les deux partenaires impliqués dans une relation sexuelle, au moins 50%, de la part de responsabilité de la contraception et les décisions de vie difficiles que peuvent engendrer une grossesse non désirée.
GROSSESSE CRÉATIVE
Et bien entendu, un film ne peut s’appeler Ninja Baby s’il ne promet pas une petite trame narrative à saveur geek. C’est donc le moment de parler des éléments les plus importants de cette œuvre, les ninjas et les bandes dessinées !
Alors que Rakel dessine dans ses temps libres (elle semble avoir beaucoup de temps libre, mais pas assez pour ramasser sa chambre), son univers créatif est soudainement inspiré par son professeur d’arts martiaux et de ce bébé ninja furtif qui a très bien su se faire discret durant les 6 premiers mois.
La matérialisation animée de ce bébé ninja que Rakel fait naître avec ses crayons, et qu’elle est la seule à voir, vient à l’écran, briser le ton d’une mise en scène hyper réaliste. D’ailleurs, toute la beauté émotionnelle de ce long métrage, adapté de l’œuvre dessinée de Inga Sætre, tire sa raison d’être dans cette illustration forte de symbolisme, d’un fœtus qui connecte et converse avec la femme qui le porte.
Et si dans la pure tradition des comédies dramatiques, on ne s’échauffe pas les mains contre les cuisses force de rire aux éclats, on passe tout de même la plus grande partie du film avec un petit sourire au coin des lèvres en se réjouissant de situations tout à fait délicieuses qui peuvent tenir du fantasme dans nos propres vies (sans jamais s’éloigner du réalisme), mais qui font du bien à regarder et donnent envie tantôt de faire un gros high five et tantôt un gros câlin à cette femme-enfan, elle-même un peu ninja finalement, (parce qu’on s’y attache vraiment).
À l’instar de Ninja baby qui s'immisce avec discrétion, agilité et force dans l’utérus de Rakel, l’oeuvre de Yngvild Sve Flikke nous apporte doucement jusqu’à la fin avec quelques surprises et dépose, avec agilité dans nos esprits, beaucoup de matière à réfléchir et à débattre… de façon décomplexée !
Et vous, vos impressions ?